Vers une normalisation du contentieux répressif douanier

Le contentieux douanier français est caractérisé par l’existence des pouvoirs exceptionnels accordés aux agents de l’Administration des Douanes pour la recherche et la constatation des infractions, leur poursuite et leur sanction.

Toutefois, notre contentieux douanier évolue et tend à se rapprocher du droit commun :

    • bien évidemment, sous l’influence grandissante du droit communautaire et des arrêts rendus par la Cour Européenne des Droits de l’Homme : c’est

      notamment pour respecter une décision de la Cour de Justice de l’Union européenne que la Loi du 30 décembre 2009 a consacré le « droit d’être

      entendu » préalablement à la notification par l’Administration à l’importeteur d’une décision défavorable

      • mais également, par des réformes purement nationales, destinées à réparer les abus les plus criants du contentieux douanier.

      C’est notamment le cas de l’évolution progressive du régime des sanctions fiscales (amendes et confiscation des marchandises ou condamnation au paiement d’une somme en tenant lieu).

      Lorsque la Loi du 8 juillet 1987 a supprimé l’article 369 § 2 du Code des douanes qui interdisait au Juge de relaxer pour défaut d’intention, il a toutefois maintenu le caractère contraventionnel des délits douaniers.

      La Cour de Cassation en a donc conclu que, si le prévenu pouvait désormais rapporter la preuve de sa bonne foi, la mauvaise foi n’était pas pour autant un élément constitutif du délit douanier.

      En conséquence, l’Administration demeure libre de poursuivre au pénal les infractions douanières de toute nature.
      Or, si la même Loi a autorisé le Juge à retenir les circonstances atténuantes, elle avait prévu qu’il ne pourrait réduire les sanctions fiscales à plus du tiers de la valeur des marchandises de fraude.

      Dans la majorité des cas les pénalités douanières, même réduites au tiers, demeuraient d’un montant exorbitant susceptible de mettre durablement en danger la survie des entreprises et la solvabilité de leurs dirigeants.

      En outre, le montant des sanctions douanières françaises était totalement exorbitant par rapport à celles pratiquées dans la majorité des autres Etats membres, ce qui conduisait beaucoup d’entreprises, notamment étrangères, à privilégier un dédouanement en dehors de France, pour le plus grand désavantage des ports français.

      Très récemment, le Législateur a toutefois pris une initiative plus que bienvenue, et fait une avancée majeure pour normaliser le contentieux pénal douanier puisque par la Loi de finances rectificative pour 2013, le contentieux douanier a précédé le droit commun sur la promesse de campagne du Président Hollande de supprimer les peines dites « plancher ».

      En effet, l’article 40 de cette Loi (Loi n°2013/1279 du 29 décembre 2013) a de nouveau modifié l’article 369 du Code des douanes en abrogeant l’interdiction faite au Juge pénal, lorsqu’il reconnait les circonstances atténuantes, de descendre au dessous du tiers des sanctions fiscales.

      Même si les peines minimales, dites « peines plancher », étaient une innovation récente en droit commun, puisqu’elles avaient été instaurées en 2007, force est de reconnaître que c’est bien la première fois qu’une réforme du contentieux douanier a précédé une réforme du droit commun dans un sens favorable aux prévenus.

      Ainsi, à compter du 29 décembre 2013, le Juge peut donc prendre en compte la gravité réelle de l’infraction commise et la personnalité de son auteur pour  fixer librement le montant des pénalités douanières sans être astreint à un seuil minimum, ce qui l’obligera à procéder à un examen particulier de chaque situation individuelle.

      Comme toute réforme de procédure, cette nouvelle mesure est applicable aux affaires en cours, non encore définitivement jugées.

      On pourrait y voir un changement significatif d’approche du traitement des affaires traitées par l’Administration des Douane si l’on ne devait pas immédiatement relativiser la portée d’un tel changement de mentalité en constatant que l’article 1800 du Code Général des Impôts maintient, en matière de contributions indirectes, ce système archaïque de sanction minimale du tiers.